Aujourd’hui, je ne vais pas parler de jeux vidéo, ni de
cinéma, ni de bande dessinée, et en même temps, je vais parler de tout ça à la
fois. Je vais parler d’art. Parce que oui, ce que j’ai cité plus haut, c’est de
l’art. Je pense que tout le monde ici approuve. Septième art pour l’un,
neuvième pour l’autre, et… rien pour les jeux vidéo… Pourtant il s’agit bien
d’art. Et pas de n’importe quel art. D’art ludique. C’est ce qu’essaye de nous
démontrer brillamment le livre qui s’intitule assez justement Art Ludique. Loin de moi l’idée de faire
de la pub, mais simplement de rendre sa juste valeur à se livre qui, j’ai peur,
reste trop méconnu du grand public, ou tout simplement de la cible concernée.
Je tiens avant tout à préciser que j’ai connu cet admirable
bouquin, sorti à la fin de l’année dernière, grâce à un confrère de Game One, à
l’époque où je n’étais encore que simple stagiaire. Et je le remercie vivement.
Bon, maintenant que le passage émotion est terminé, passons en au fait, et
parlons de ce remarquable ouvrage. Sous cette appellation, art ludique, se
cache ce que les auteurs mettent en rapport avec l’Entertainment. En gros, le
divertissement de masse, grand public, mais qui n’est pas pour autant à
négliger en tant qu’art. Beaucoup trop de gens ont tendance à prendre de haut
la bande dessinée, à considérer les films d’animations comme un simple
divertissement pour gamins, et à voir les jeux vidéo comme une industrie
purement lucrative qui n’intéresse que les ados attardés, et sans aucun travail
sur le fond ou sur la forme. Et pourtant, ce n’est pas le cas, bien au
contraire. Il y a bien sûr des films d’animations navrants, des bandes dessinés
inutiles, et des jeux vidéo affligeants, mais il y a surtout des artistes
derrière toutes productions de qualités. Et c’est à eux que le livre rend
hommage.
Production, création, conception, toutes les étapes sont
présentées, avec les acteurs du milieu. Les trois grands médias de cet art
ludique sont admirablement bien décrits, mais surtout, ils sont ciblés avant d’en
confirmer l’universalité. C’est à travers les trois grands pôles majeurs
actuels que l’ouvrage démontre le talent de ces artistes et l’importance de ces
formes d’expressions artistiques, c’est-à-dire l’Europe, les Etats-Unis et le
Japon. Et bien sûr, chaque type d’art tient une importance dans chacun de ces
trois endroits. Pour les jeunes qui croiraient que la bande dessinée se résume
au manga, aux productions japonaises, je rappelle que c’est en Europe, en
Suisse, que le première BD a vu le jour, au XIXème siècle. Et c’est la Belgique
et la France qui lui a donné ses lettres de noblesses. Avant de devenir
américain, Tintin était belge, Astérix est français, et évidemment, le plus
grand confectionneur de bande dessinée, André Franquin, est belge. QRN sur Bretzelburg, le meilleur album
de bande dessinée au monde, si vous ne le connaissez pas, courrez donc vous le
procurer absolument. Et bien sûr, dans un autre registre, le malheureusement très
récemment disparu Jean Giraud alias Moebius, dont les travaux, les œuvres
picturales, ont influencé des maîtres du genre à l’instar de Hayao Miyazaki,
oui, rien que ça. En fait, ce qui est véritablement bien dans ce livre, c’est
qu’il montre les influences de chacun sur les autres, et on se rend compte
alors que malgré les distances et les différences de cultures, tout finit par
se rejoindre, pour ne former qu’une seule forme d’art qui a réussi à évoluer en
diverses catégories. Très rapidement les américains se sont inspirés des bandes
dessinées européennes et ont eu l’idée du phylactère (la bulle en BD), repris
alors par les européens, puis les japonais. Et ce n’est qu’un exemple parmi
d’autres.
Pour ce qui est de l’animation, on cite énormément Walt Disney,
l’homme avant la firme, et sa manière d’avoir inventé le principe du studio
d’animation et sa production. Hayao Miyazaki évidemment est de la partie, cela
serait un crime de l’oublier. Encore une fois, on nous montre le tout comme un
art véritable, ce que cela est finalement. Le travail de chacun est examiné et
présenté de fort belle manière. Et encore une fois, les influences peuvent
surprendre et prouvent une nouvelle fois que tout art est redevable à un autre.
Le plus bel exemple reste celui de l’aspect des personnages de mangas. Le manga
est véritablement apparu au Japon après la guerre, grâce à l’influence des
comics. C’est Osamu Tezuka qui en est considéré comme le père véritable (le
papa d’Astroboy et du Roi Léo entre autres), et pour ceux qui ne le sauraient
pas (moi-même je l’ai appris en lisant ce livre), le design des yeux de
personnages de mangas, si grands, vient de… Bambi. Oui, du personnage de Bambi
dans le film d’animation, qui a été la source d’inspiration de Tezuka. D’un
dessin animé américain donc. Chaque forme de ces nouveaux arts a été influencée
par un autre et va donner des idées à un autre encore. Et la force de ce livre,
c’est de nous permettre de l’apprendre intelligemment et de manière fort
captivante.
Enfin, parlons du jeu vidéo. Japon, Etats-Unis, France, tous
sont là. Oui oui, France, vous avez bien lu. En même temps, je ne l’apprends à
personne, la France a quand même Frédéric Raynal et Dieu/Michel Ancel, entre
autres encore, à son palmarès. Ici, ce qui est le plus intéressant, c’est de
réussir à montrer le jeu vidéo tel qu’il est, comme un art, encore parfois trop
mal perçu. C’est sûr que quand on voit que les plus grosses ventes c’est Call
of Duty Pan Pan Boum Boum, ça aide pas à percevoir le jeu vidéo comme un art…
Mais bon, là je m’égare. Ici, on démontre que des personnalités telles que
Shigeru Miyamoto, Hideo Kojima ou encore Michel Ancel, sont de véritables
génies créatifs, si cela était encore nécessaire à prouver, à l’instar des
génies du milieu de la bande dessinée ou de l’animation. Chaque art est
équivalent, et dorénavant il est temps de donner ses lettres de noblesses au
jeu vidéo, encore trop sous-estimé de nos jours.
Mais avant tout, c’est l’inspiration de chacun de ses arts
dans un autre qui est mis en avant. De nos jours, bien qu’ils restent tous les
trois dissociables, on ne peut nier que tous s’influencent. Il n’y a qu’à voir
mes tests récents par exemple. Les Royaumes d’Amalur : Reckoning a été
confié en partie à Todd Mc Farlane, dessinateur de comics et créateur de Spawn.
Asura’s Wrath est totalement influencé par les animés japonais (pour peu qu’il
soit un jeu vidéo). Et tout cela n’est pas récent. Les dessinateurs de bande
dessinée ont assez travaillé avec le jeu vidéo, à partir du moment où le
support et la puissance l’a véritablement permis. Et pour les jeux vidéo
inspirés par les films d’animation, je pense qu’il me suffit simplement de
citer Dragon’s Lair, dès 1983. Mais c’est aussi valable dans l’autre sens. Les
jeux vidéo ont influencé le cinéma et les films d’animation. Le premier qui me
vient en tête est The Prodigies, un film d’animation français sorti en salle en
juin 2011. Pour l’influence de la bande dessinée sur les films d’animations et
vice versa, c’est encore assez évident je pense, dans les généralités du moins.
En fait, toute cette nouvelle démocratisation de l’art ludique, cet art de
l’Entertainment, et surtout, la preuve qu’il s’agit bien ici d’art, voici ce
qui est démontré dans cet ouvrage assez merveilleux.
Je ne peux que vous encourager à lire ce bouquin fantastique.
Bande dessinée, comics, manga, animé, films d’animation, et jeu vidéo répondent
à l’appel. Une première partie explique le concept d’art ludique et en retrace
le parcours, les inspirations et influences, l’impact, à travers les trois
grands pôles, et une seconde partie s’attarde sur les grands noms de ces formes
d’art, et les noms parfois inconnus qui se cachent derrière de grandes œuvres
(Peter de Sève par exemple, qui connait son nom ? Parce que vous
connaissez tous son œuvre, c’est sûr) ou des personnages mondialement connus.
Le livre est gros, le livre est long, mais c’est un véritable plaisir de le
parcourir. Et puis, un bouquin qui revendique et prouve que tout ce que l’on
aime, c’est de l’art, c’est une raison suffisante si les autres arguments ne
vous ont pas convaincus.
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