Régulièrement, on parle de
série télévisée. La plupart du temps, ce sont des séries qui ont
plus ou moins un lien avec l'univers dit « geek »,
super-héros, science-fiction, jeu-vidéo, etc..., afin de respecter
une sorte de charte éditoriale respectant l'univers du site, mais
aujourd'hui est présenté quelque chose de quelque peu différent.
Pas de super-héros ou de vaisseaux spatiaux, mais une série sur le
monde de l'adolescence qui n'a de « geek » qu'une partie
du titre. Sauf que voilà, cette série est totalement monstrueuse et
s'impose comme un passage obligé à tous les fans de films d'ados,
ou même de séries, tout simplement. Et ce n'est pas parce que la
série est quasiment inconnue chez nous qu'il ne faut pas s'y
intéresser, bien au contraire.
Créée et diffusée à la
fin des années 90, Freaks and Geeks n'a pas eu le succès escompté.
Si plus tard, la série a été à juste titre reconnue comme l'une
des meilleures, citées régulièrement, et passant de presque
inconnue à succès critique unanime, il n'en a pas été de même
lors de la diffusion. Arrêtée après une saison, et seulement
dix-huit épisodes, il est évident qu'elle n'a pas fait long feu et
n'a pas eu la réelle occasion de marquer les esprits. Pourtant,
Freaks and Geeks est une série intelligente, drôle, mais surtout
sincère, et c'est bien ça qui fait toute la différence.
Cette première et unique
saison se déroule lors de l'année scolaire 1980/1981 d'un lycée du
Michigan. Lindsay, jeune fille bien sous tout rapport, ancienne
participante aux concours de math les plus prestigieux, élève
modèle, a changé depuis le décès de sa grand-mère. Elle décide
de se faire de nouveaux amis, et elle approche donc les « freaks »,
ces jeunes gens toujours entre eux, qui ont des préoccupations
autres que les cours et le lycée, et qui sont réputés pour être
considérés comme des « voyous », fumeurs de joints et
buveurs d'alcool. Sam, le petit frère de Lindsay, entre au lycée
pour sa première année. Avec ses amis de toujours, Neal et Bill, il
espère bien vivre ses quatre années de lycée paisiblement.
Malheureusement, il se rend compte que tout ne risque pas de se
dérouler comme prévu, vu que lui et ses amis sont considérés
comme des « geeks ». Au travers des différents
personnages et de leur point de vue, c'est à la fois un regard sur
le début des années 80 et sa société qui est porté, mais c'est
surtout une vision juste et non caricaturale de l'adolescence qui est
abordée. Où comment se reconnaître dans des personnages forcément
marginaux, mais qui au fond ne sont pas différents des autres
contrairement à ce qu'eux ou les autres aimeraient faire croire.
Créée par Paul Feig (à
qui l'on doit entre autres le récent Bridesmaids) et produite par
Judd Apatow et Dreamworks, la série se veut la plus proche possible
de la réalité. Feig avait 18 ans en 1980, il a donc eu quasiment le
même âge que la plupart des protagonistes de la série à l'époque.
Le représentation de la période est donc totalement crédible. On y
retrouve de multiples références cinématographiques, passant par L'Empire contre-attaque ou bien des comédies typiquement
ricaines avec les Stars de l'époque, comme The Jerk avec Steve
Martin, mais aussi des références au jeu vidéo, comme la présence
de la célèbre Atari VCS (devenu 2600 par la suite). Cependant, bien
qu'ancrée dans une époque définie, la série porte en elle une
dimension universelle, qui arrive à s'extirper de son cadre pour
devenir tout à fait intemporelle et identifiable par tous. D'une part, puisque
l'on suit le parcours d'adolescents en marge, dans le sens où ils ne
sont ni des sportifs, ni des gens cools, mais juste des adolescents
qui s'assument tel qu'ils sont. On s'identifie alors très rapidement
à eux. D'autre part, c'est l'écriture, phénoménale et pleine de
justesse, qui permet à la série de sortir du lot. On est bien loin
des clichés du genre comme le sont la plupart des séries d'ados à
l'instar des Frères Scott pour ne citer que celle-ci. Rien n'est
outrageusement dramatisé, aucune séquence n'a pour but d'absolument
nous émouvoir juste pour le principe, ou de nous faire rire parce
que c'est la norme, dans Freaks and Geeks, tout respire le naturel,
au point d'en devenir évident. Il y a bien sûr des situations
presque rituelles pour ce genre de séries et certains passages
obligés, mais tous ses aspects sont traités de manière assez
différente du reste. Et au final, face à cela, en plus du prendre
du plaisir à regarder un épisode, c'est une réelle réflexion qui
s'empare de nous, sans que cela nous soit pour autant imposé. Une
réflexion qui vient naturellement vers nous, c'est aussi à ça que
l'on reconnaît une bonne série.
Qu'on se le dise, c'est
aussi grâce au talent de Judd Apatow que la série assure. Bien sûr,
c'est Paul Feig qui est derrière la création et qui a le mérite
d'avoir fait exister cette série et ses personnages, mais on
retrouve réellement la marque de fabrique Apatow dans la série, et
pour le meilleur. Le producteur, réalisateur, scénariste endosse
tous ses rôles dans la série. Il réalise trois épisodes et
participe à l'écriture de plusieurs d'entre eux. Cela se ressent
vraiment dans la façon d'appréhender les personnages et les
situations. On peut se trouver face à des situations comiques
parfois tout à fait saugrenues, et aussi se retrouver confronter à
des situations humaines et réalistes d'une sincérité totale, comme
on peut le voir dans d'autres films ou productions Apatow, qui sont
souvent très mal estimés en France. Le casting aussi reflète bien
le producteur. Si l'un des rôles principaux revient à la ravissante
Linda Cardellini, qui n'a plus fait d'apparition dans les films du
producteur, on retrouve des figures plus emblêmatiques. Seth Rogen,
alors âgé de dix-sept ans, et qui tient ici son premier rôle,
avant de devenir l'un des comédiens fétiches d'Apatow. On y trouve
aussi Jason Segel, ou bien encore James Franco, qui pour la plupart
ont eu la chance de devenir réellement célèbre dans le milieu
grâce à la série. Il y a bien sûr des guests, parfois surprenant.
Pour n'en citer que quelques-uns, on peut voir par exemple Jason
Schwartzman, David Krumholtz, Shia LaBeouf, ou encore Ben Stiller. Un
bon casting, représentatif du contenu, qui sait être drôle quand
nécessaire, mais aussi plus dramatique, et surtout constamment
juste.
Un générique à l'image de la série, rock'n'roll!
La plus grande force de
Freaks and Geeks, vient de son positionnement envers les groupes.
Tout le monde le sait, aux Etats-Unis, il y a réellement des groupes
qui se forment au lycée, ce n'est pas une invention d'Hollywood.
Ici, comme le nom de la série l'indique, il y a les « freaks »
et les « geeks ». Cependant, au lieu de tout tourner en
dérision et d'amener une caricature infâme digne des pires films de
genre, la série pose des bases solides et ne fait pas d'un groupe un
regroupement de gens tous identiques sans lien avec le monde
extérieur. Linda, la nouvelle freak, est une ancienne élève
modèle, et elle continue d'ailleurs à fréquenter encore une de ses
anciennes amies dont les convictions sont en oppositions avec ces
freaks. Mais qui sont-ils réellement ? On les montre comme des
voyous dans le lycée, mais ils ne sont pas dépeint comme tel dans
la série. Ce sont simplement des gamins paumés, passionnés de
rock'n'roll, marginaux, et qui n'entrent pas dans les normes
qu'essaie d'imposer une société à la fois trop prude et trop
réglementaire. Ils ne sont pas des voyous, bien que cela leur arrive
d'enfreindre la loi, ce sont simplement des lycéens qui n'ont de
réel repères que ceux qu'ils s'imposent. Quant au geeks, ce ne sont
pas de simples ados boutonneux fans de comics ou de science-fiction.
Bien sûr ils ont des passions, mais avant tout ce sont des
adolescents qui manquent de confiance en eux et qui restent entre eux
en partie à cause de ça, parce que la plupart des élèves cools ne
les accepteraient jamais. Ça, c'est ce que l'on nous montre au
départ, toutefois, durant ces dix-huit épisodes, l'évolution des
personnages et des situations vont nous montrer qu'au final, ces
groupes n'existent pas, ou du moins uniquement dans l'esprit de ceux
qui le souhaitent. Freaks, geeks, sportifs, gens cools, etc... Tous
sont finalement les mêmes et partagent les mêmes sentiments, les
mêmes envies, et parfois les mêmes passions. C'est bien là la
grande force de Freaks and Geeks, créer pour mieux casser, idéaliser
pour mieux représenter.
Vous l'aurez compris, Freaks
and Geeks est la meilleure série consacré à l'adolescence et à
ses protagonistes. D'une justesse et d'une sincérité absolue, on
décrit, on montre, on réfléchit sur les conditions de
l'adolescence sans jamais s'en moquer. Dotée d'une réelle réflexion
implicite, qui n'a pas pour but de nous imposer une morale ou une
manière de penser, chacun réagira de façon différente, mais tout
le monde s'y retrouvera. Malheureusement inédite en DVD chez nous,
il faudra passer par l'export pour se procurer les dix-huit épisodes
de cette unique saison (zone 1 obligatoire, attention), ou bien
passer par le streaming. On aurait aimé rester plus de temps dans
cet univers, parmi ces protagonistes, mais force est de constater que
cette seule saison se suffit à elle-même. Condensé de toute une
génération et de toute une époque, pourtant intemporel et
universel, transcendant un genre pour en devenir le nouveau maître,
représentant de toute une communauté, Freaks and Geeks dépasse
finalement le stade de simple série télévisée pour atteindre le
rang de chronique culte d'une période de la vie. Le genre de série
réaliste et juste dans laquelle une simple histoire d'amour peut
être aussi décevante que le rêve illusoire était beau, ou bien
aussi surprenante qu'un simple baiser sur Freebird.
Pour voir la série en streaming, il y a ce lien
ou bien celui-ci, plus pratique, mais ne présentant que les cinq premiers épisodes
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