Corvo, le garde du corps de l’impératrice, est accusé de son
meurtre et de l’enlèvement de sa fille. Direction la prison, pour celui qui n’est
dorénavant plus qu’un traître. La veille de son exécution, on arrive à lui
donner de l’aide afin qu’il puisse s’évader. Rejoignant une île un peu
excentrée, il y découvre des personnes qui croient en son innocence. Avec leur
aide et leurs informations, il sera en charge d’éliminer les véritables
coupables, afin de lever le voile sur le complot qui le frappe. Vengeur sanguinaire
ou justicier masqué, tel est désormais le choix qu’il vous est laissé.
Bon, surtout, ne pas me faire choper
Dishonored, c’est avant tout une ambiance, un univers. On évolue
dans une époque imaginaire, proche de celle d’un Londres de l’époque
Victorienne, mais avec des éléments novateurs et des technologies inédites. D’où
le nom d’aspect rétro-futuriste. Qu’on se le dise, c’est cet ensemble cohérent
qui joue énormément dans l’appréciation du jeu. Rien n’a été laissé au hasard,
tout a été pensé afin de s’approprier une identité unique et véritable, que peu
de jeu peuvent se tarder de posséder. Cette ville dans laquelle règne la peste,
dans laquelle un couvre-feu est prononcé, et dans laquelle vous croiserez peu d’amis,
voilà ce qui vous attend une fois que vous vous plongerez dans Dishonored. Même
les rats ne cherchent finalement qu’à vous bouffer. C’est certes cru, parfois
glauque, mais c’est toujours agréable à parcourir. Et puis, on oscille entre
les rues sales parsemées de cadavres, les égouts répugnants avec leurs malades,
ou alors des habitations de riches, bien fournies en meubles classes et œuvres d’art
présomptueuses. Il y a à boire et à manger comme on dit. De quoi régaler
tout le monde.
Cet univers marqué et cette ambiance unique ne réussissent
cependant pas à masquer des graphismes parfois un peu trop en retard
techniquement. Un peu comme un bel écrin de velours qui accueillerait une
jolie médaille, pas en or, mais simplement en bronze recouvert de dorure. Si l’aspect
artistique ne peut que laisser admiratif, l’aspect graphique, pas déplaisant
pour autant, ne peut cacher son retard. Si l’ensemble est très passable et ne s’avère
en rien dérangeant, on ne peut pas en dire autant des textures. Totalement dépassées
dans certains cas, il faudra se montrer peu exigeant pour passer outre. Heureusement,
on ne joue pas à Dishonored pour ses graphismes révolutionnaires, mais pour sa
direction artistique de toute beauté. Et on ne le répétera jamais assez, de
point de vue-là, c’est une réussite.
Tu m'as bien l'air sympathique dis donc
L’autre aspect qui met tout le monde d’accord, c’est le
gameplay du jeu. Il faut bien différencier le titre avec d’autres types de productions.
Dishonored n’est pas un FPS, c’est un jeu en vue subjective. Il ne faut pas
confondre les deux genres. FPS signifie First Person Shooter, c’est-à-dire jeu
de tir à la première personne. Or, Dishonored n’est pas un jeu de tir. Alors à
moins de considérer la saga The Elder Scrolls comme une série de FPS, on va
considérer Dishonored comme un jeu en vue subjective. Parce que le tir, même s’il
y en a, ne sera pas l’intérêt principal du jeu. Le but principal des diverses
missions est d’assassiner une ou plusieurs personnes. Pour cela, il faut
accéder à leur bâtiment, s’introduire dans la pièce dans laquelle ils sont, et
faire son affaire, avant de prendre la poudre d’escampette. On peut la jouer
gros bourrin barbare et massacrer tout le monde sur son passage. Sauf qu’entre
les soldats dans les rues qui assurent le couvre-feu, les gardes dans les
bâtiments, et autres assassins ou voyous que vous rencontrerez, il faut d’une,
réussir à survivre, et de deux avoir assez de munitions. Evidemment, on se bat
principalement à l’épée dans le jeu, mais face à quatre ou cinq hommes, qui n’hésitent
pas à tirer à vue, on apprécie son arbalète ou son pistolet. Et quand on sait
que chacune des armes ne peuvent contenir que dix munitions (plus avec des
améliorations), on se dit que le choix du passage en force n’est pas forcément
le bon. Surtout que se faire repérer équivaut à une alarme et donc à une bonne
flopée de soldats. On préférera alors l’autre solution, si possible.
L’autre solution qui consiste à l’infiltration. Ce choix
peut se révéler plus judicieux pour plusieurs raisons. D’une, c’est moins
dangereux si on gère bien ses déplacements et si l’on ne se fait pas repérer,
on a moins de risque de se faire blesser ou tuer. De deux, cela peut éviter de
tuer des gens. Pas nécessairement, puisque l’on peut assassiner discrètement
ses adversaires, mais les meurtres sont souvent plus bruyants. Le mieux est
alors d’endormir ses victimes, soit à mains nues, soit avec des fléchettes
spéciales. Le choix de ne pas tuer, ou le moins possible, apporte d’ailleurs
des avantages qui ne sont en rien négligeables. Plus on tue, plus il y aura de
rats et d’infectés en ville. De même, les gens nous craindront, installant des
relations autres. Et surtout, un trop plein de meurtres aboutira à la fin la
plus sombre du jeu. Et ça, ce n’est pas rien.
Ouh le petit voyeur!
Mais l’infiltration, ce n’est pas juste une simple
alternative à une autre solution plus radicale. C’est aussi le choix de la
découverte et des possibilités multiples. Passer en force, c’est au final
prendre le chemin le plus évident. S’infiltrer, se faufiler, cela demande de l’observation,
de la concentration, de la patience. On peut aisément découvrir divers
passages, certains regorgeant de secrets. En effet, si les missions sont
précises, on peut facilement s’en éloigner, soit pour en trouver d’autres,
annexes, soit pour fouiller un peu et trouver des objets qui nous arrangent
bien. Des pièces, des objets de valeurs, des munitions, de quoi se régénérer,
les choses de base, mais aussi des runes ou bien des bone charms, qui
permettent d’acquérir des pouvoirs ou augmentations. Fouiller partout, voici une
liberté qui est de la partie, comme la liberté de choix dans ses actions. Passer
par les toits, se téléporter d’un endroit à un autre sans être vu, ou même contrôler
un animal afin de passer dans des endroits inaccessible autrement, voici ce que
propose Dishonored.
Cependant, on ne peut pas réduire le titre à ce simple
aspect. Il ne faut pas oublier qu’avant tout, pour pouvoir varier les
alternatives, il faut faire des choix. Le choix des armes par exemple. Le pistolet est en effet puissant, mais bruyant. L’arbalète, risque de ne pas tuer en
un coup, mais n’émet quasiment aucun son. Attention, elle est un poil
longue à recharger, logique. Ou alors des fléchettes explosives, qui enflamment
un ou plusieurs ennemis. Pas discret pour un sou, mais efficace comme pas deux.
Ou encore les fléchettes à injection, non létales, qui endorment la victime, mais
avec un petit temps, ce qui peut être embêtant s’il a le temps de donner l’alarme
avant de tomber dans un sommeil profond. Evidemment, je ne parle que des armes
de base, qu’il est possible d’améliorer moyennant finance. Meilleure vue, temps
de recharge rapide, endormissement immédiat, et j’en passe. A côté de cela, il
est aussi possible de choisir et améliorer ses pouvoirs. Se téléporter d’une
certaine distance à une autre, contrôler un animal, ralentir le temps, appeler
une armée de rats à sa rescousse… Tous ses pouvoirs ont une utilité et
conviendront à tous types de jeu. Et ils sont tous améliorables, afin de
devenir peu à peu surpuissants. Il faut tout de même bien gérer sa jauge de
mana, mais on faisant bien attention à tout, ça devrait aller. Dishonored offre
donc une part de liberté appréciable qui saura s’habituer à toutes sortes de
gameplay.
C'est toujours plus éthique que de le tuer
Et puis, il ne faut pas oublier que le titre, en plus d’une
ambiance unique, bénéficie d’un doublage magistral au casting impressionnant. On
retrouve en effet parmi les acteurs de doublage Carrie Fisher (Princesse Leia),
Chloë Grace Moretz (Hit Girl), Susan Sarandon, Michael Madsen (Mr Blonde), ou
encore Brad Dourif. Inutile de préciser que le doublage est excellent, les noms
se suffisent à eux-mêmes. Quant au reste de l’ambiance sonore, rien à redire
non plus, tout sait très bien s’adapter aux situations. Que du bon.
Finalement, Dishonored semble avoir tout pour lui. Un univers
du tonnerre, un gameplay génial aux choix multiples, une ambiance sonore qui
dépote, rien que ne pourrait l’empêcher de concourir au titre de jeu de l’année.
Hélas, mille fois hélas, tout n’est pas aussi immaculé qu’on voudrait le
croire, et il y a bien quelque chose qui entache le jeu. Malgré toutes ces
qualités, il y a bien une chose qui dérange. Hormis son univers, en quoi le jeu
se démarque-t-il des autres productions du même acabit ? Tout le monde
crie à l’originalité, mais à part son ambiance, le reste est très classique. On
retrouve les éléments qui ont fait le succès de certains jeux, Half-Life en
tête, mais Dishonored ne réinvente rien, ni ne renouvelle véritablement quoique
ce soit. Bien sûr, parmi tous les FPS du style Call of Duty et consorts, c’est
original et rafraichissant, mais l’approche et le genre n’est pas le même non
plus. Et puis, il y a eu Deus Ex : Human Revolution l’année dernière, qui
offrait une expérience plus ou moins similaire, et plus poussée à mon goût. Au final,
Dishonored n’offre pas de monde ouvert. On va à un endroit pour une mission,
puis on revient au QG. On ne se balade pas véritablement librement dans
Dunwall, juste dans les quartiers lors des missions. Et puis, le scénario est
finalement très classique. Là où Deus Ex : Human Revolution proposait une
réflexion sur l’humanité et le transgenre avec les améliorations, ici on ne
fait que suivre une trame narrative certes intéressante, mais peu innovante. Et
encore une fois, on ne le dira assez jamais, mais le gameplay n’est pas assez
original. Le choix du bourrin ou de l’infiltration, c’est connu, ce n’est pas
nouveau. Pour une nouvelle licence, c’est bien de l’originalité qu’il manque.
De grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités
Avant de conclure, je vais pousser un petit coup de gueule,
qui vaut pour Dishonored comme pour d’autres jeux. Pourquoi imposer la version
française ? Lorsqu’un jeu possède un tel doublage original, pourquoi ne
pas mettre le choix des voix en option ? Plein de jeux le font, même de
grande envergure. Alors ça ne doit pas être bien compliqué. C’est pareil pour
la plupart des jeux, c’est rageant. On ne profite ni des dialogues originaux,
ni des voix choisies par les studios. Bien sûr, beaucoup préfèrent la VF, mais
mince quoi, il y en a plus qu’on le croit qui veulent jouer en version
originale. Qu’on impose pas la VO, ok, mais qu’on impose pas la VF non plus. J’ai
dû récupérer un patch non officiel et bidouiller les programmes du jeu afin de
mettre tout en VO. Et en VO intégrale, sans aucun texte français. Ça va que je me débrouille pas trop mal avec la langue de Shakespeare, mais tout de même. C’est vraiment
embêtant ce problème, sur trop de jeux. Et pendant que j’y suis, ceux qui disent
que la VO de Dishonored, c’est la VF parce que c’est un jeu français, non, ce n’est
pas le cas. La VO a été choisie par Bethesda, l’éditeur, et non Arkane Studios,
les développeurs, même s’ils ont porté attention à la VF. Voilà, c’était mon
coup de gueule.
Que dire finalement ? Dishonored honore ses promesses,
et nous offre un jeu à l’univers inédit tout à fait séduisant. C’est bien cela
qui fait tout le charme du jeu. Le reste s’en sort très bien aussi,
malheureusement, on ne peut pas s’empêcher de penser à d’autres productions,
tant le gameplay, bien que quasi parfait, manque d’originalité. C’est
effectivement un vent de fraicheur parmi les sorties des FPS de cette fin d’année,
mais ce n’est malheureusement pas le messie tant attendu. Peut-être que
Dishonored est sorti un peu trop tard, Deus Ex : Human Revolution lui
faisant un peu de tort. Au final, on retiendra cet univers et son ambiance,
tout simplement grandiose, et on appréciera son gameplay à liberté de choix d’action.
S’il n’est définitivement pas le jeu de cette année, Dishonored n’en demeure pas
moins un très bon jeu, un des meilleurs de cette rentrée.
17/20
Merci , comme quoi Dishonored a des défauts mais je vais peut-être me le procurer !
RépondreSupprimerMalgré ma critique moins enthousiaste que la plupart des autres, le jeu n'en reste pas moins très bon, et se le procurer est un choix judicieux.
SupprimerJ'ai moi même le jeu et je trouve ton test très bon, et surtout objectif, objectivité dont certains testeurs "officiels" me semblent manquer cruellement... je me pose la question parfois de l'influence voire de la corruption de certains éditeurs de jeux envers ces testeurs, qu'en penses-tu ? Il y'a quand même parfois un énorme décalage entre le test et l'avis des joueurs (ex : call of duty : black ops II)
RépondreSupprimerPour Black Ops II, les tests ne sont pas mauvais, et les joueurs continuent à baver dessus, donc je ne sais pas quoi trop dire pour cet exemple.
RépondreSupprimerPour ce qui est d'une certaine corruption dans le milieu, je n'en sais rien, c'est possible, il faut l'admettre, mais je pense que tout est une question de point de vue, et qu'entre Gamekult, Jeuxvideo.com, ou encore JeuxActu, les avis divergent ce qui est normal. Et finalement, les différences énormes entre les rédactions à propos d'un seul titre sont assez rares (bon, ne pas lire les différents avis sur Wonderbook, ça casse mon argumentation).
Pour Dishonored, même si mon test se veut objectif, et qu'il l'est, il y a comme partout une part de subjectivité. Je pense juste que les 19/20 à tout va du jeu viennent d'un cruel manque de renouveau dans le genre, du fait que le jeu soit français, et aussi du fait que tout le monde semble avoir oublié la grandeur de Deus Es : Human Revolution.
Donc merci d'avoir apprécié mon test, que je ne considère pas plus objectif qu'un autre finalement.