Quand on entend film sur la culture geek, on s’imagine
absolument des « geeks » comme personnages. Pourtant, ici, il n’en
est rien. Alors que Galaxy Quest
propose comme héros des acteurs d’une série ersatz de Star Trek allant de
conventions en conventions, ou alors Fanboys
des fans de Star Wars voulant se rendre au ranch de George Lucas pour voir en
avant-première La Menace Fantôme, Scott Pilgrim Vs The World nous raconte
l’histoire d’un mec cool qui ne sait pas gérer sa vie amoureuse. Ouais, dit
comme ça, c’est pas très bandant. C’est pour ça que je propose de revenir sur
les origines du film et du personnage. A l’origine, Scott Pilgrim, c’est un
roman graphique canadien en 6 tomes, créé par Bryan Lee O’Malley. Le film n’en
est donc qu’une adaptation. Et si je disais plus haut que le personnage
principal, étonnamment nommé Scott Pilgrim, n’était pas un geek, cela ne
l’empêche pas de jouer aux jeux vidéo, dans la bande dessinée du moins. Ce
qu’il faut savoir aussi, c’est que Scott Pilgrim n’est pas un roman graphique
ou comics comme les autres. L’influence manga se fait clairement ressentir, que
ce soit dans le format des bouquins, le style graphique ou encore le découpage.
Et l’influence jeu vidéo aussi. Parce que les références ne sont pas uniquement
présentes du fait que le héros y joue. Les clins d’œil graphiques sont de la
partie, et bien pensés, et le scénario fait tout pour dissimuler des gags
par-ci par-là sur différents univers vidéoludique. Mais finalement, c’est dans
l’essence même de la bande dessinée que se trouve la référence ultime. Parce
qu’en effet, Scott Pilgrim ne sait pas gérer sa vie amoureuse, et cela lui pose
problème. Il rencontre la sublime Ramona Flowers alors qu’il fréquente encore
une lycéenne. Rien de bien grave en soit, enfin un peu quand même, mais ce
qu’il ne sait pas, c’est qu’avant de pouvoir vivre en paix avec cette nouvelle
fille qu’il aime tant, il devra affronter ses sept ex copains. Le pitch paraît
très con comme ça, et presque inintéressant, sauf que voilà, tous ses ex petits
amis sont maléfiques. Il ne faut donc pas s’attendre à du sérieux, pas à du
réalisme, mais plus à des sortes de différents niveaux d’un jeu (représentés
par les 6 tomes) avec un boss à battre à chaque fois (les exs). Et en cela,
c’est purement et véritablement un truc de geeks assez référencé. Alors
imaginez le film basé dessus !
Je ne vous ferais pas l'affront de préciser la référence
Justement, le film, parlons-en. Avant même de commencer, ce
qu’il faut savoir, et c’est vrai, c’est qu’il est réalisé de main de maître par
Edgar Wright, qu’il bénéficie d’un scénario béton, et qu’il possède un des
meilleurs montages de ces dernières années. Voilà, maintenant, je peux enfin
parler du film. Concentré de références à la culture populaire, le film est
aussi une ode à l’art jeu vidéo, qui réussit parfaitement à en assimiler les
codes, afin de les retranscrire au mieux. Pas question de faire ici un film tel
que Sucker Punch, qui n’est qu’une
sorte de grosse cinématique de jeu avec actrices réelles. Non, là on veut
véritablement faire un film, hyper référencé, et parfaitement maîtrisé, pas question
de laisser le spectateur devant un bête spectacle visuel à l’allure d’une cut
scene de Final Fantasy XIII. Et dès le début, le ton est donné. Edgar Wright
connaît son sujet, et il nous le prouve. Dès le démarrage, on sait que le film
rendra hommage aux jeux vidéo, particulièrement aux productions 8 et 16-bits.
Il n’y a qu’à voir le logo Universal pour le comprendre. Et ce n’est que le
début. Pendant 1h53, tout s’enchaîne, réjouissant de bonheur le spectateur à
chaque instant. Alors que la bande dessinée s’étale sur six tomes, laissant
ainsi l’histoire prendre son temps et
durer un petit moment (plusieurs mois), le film, œuvre cinématographique
oblige, opte pour un rythme effréné qui ne laisse aucun répit aux spectateurs.
On s’en prend plein la gueule, on n’en prend plein la vue, on n’en prend plein
les oreilles, mais qu’est-ce que c’est bon !!! Et bien sûr, tout comme
l’est la bande dessinée, le film est rempli d’humour. Volontairement référencé,
ou génialement absurde, Scott Pilgrim Vs
The World est immédiatement entré dans mon top 5 des films qui me font le
plus rire. Honnêtement, même si je ris facilement quand c’est vraiment drôle,
atteindre ce point-là, il fallait quand même le faire. Et comme précisé plus
haut, le film possède aussi une bande son du tonnerre. Qu’il s’agisse de
morceaux pré existants, comme le fameux « Scott Pilgrim » de
Plumtree, qui a donné son nom au personnage, ou des compositions originales, on
obtient au final une bande son rock garage bien entraînante et tout à fait
adaptée au film. Quand on pense que ce film n’a eu que très peu de succès en
salle. Pas d’estime bien sûr, mais si peu de spectateurs…
La fameuse chanson "Scott Pilgrim"
Je dis depuis tout à l’heure, et aussi dans le titre de
cet article, que Scott Pilgrim Vs The
World est le film de geek ultime à mes yeux. Cependant, avant de m’attaquer
plus en profondeur sur le sujet, je vais parler de l'ambiance visuelle du film, ce
qui n’exclura pas certaines références. Partant d’un univers réaliste et se
basant sur la ville de Toronto, le cinéaste explose alors tout ce qui pourrait
s’avérer crédible afin de faire péter les clins d’œil à différents genres. La bande dessinée y
passe, c’est évident, avec une ribambelle d’onomatopées qui volent à travers
l’écran, sans être en rien ridicule ni même risible, tant l’art de manier ces
textes est maîtrisé. Et le découpage aussi tire du côté de la bande dessinée,
particulièrement du manga (comme le fait déjà l’œuvre originelle). La bande
séparatrice sur l’écran, avec ces deux personnages qui se confrontent alors. Et
bien sûr, lors des scènes de combats, outre les références aux jeux de baston,
celles aux animés nippons sont aussi de la partie. Rarement des combats
humainement réels (ça ne veut rien dire, mais j’aime bien, donc je garde.
Sinon, j’entends des combats avec acteurs réels, dans un univers à la base
réaliste) n’auront été aussi épiques avec un emploi aussi volontairement exagéré d’effets de style de de genre. Dragon Ball n’a qu’à bien se tenir. Alors évidemment,
on peut ne pas apprécier les délires visuels, totalement outranciers, mais
complètement voulus. On ne fait pas un tel film sans démesure. Parfois les couleurs
pètent, parfois les décors sont étranges, parfois le look même des personnages
peut paraître bizarre, mais au final, tout se complaît parfaitement dans une
logique visuelle et cinématographique qu’aucun autre genre n’aurait les moyens
d’assumer. Et rien que pour ça, chapeau Monsieur Wright.
C'est forcément le meilleur film du monde, quand on voit ça...
Et dorénavant j’en viens à ce qui fait, en plus de tout le
reste, la grande force du film. Références à la culture populaire, à la bande
dessinée, le film laisse aussi la part belle au jeu vidéo. Dans son principe,
je le rappelle, puisqu’au final le film est une « succession » de
niveaux avec affrontements de boss à la clé. D’ailleurs, chaque combat commence par une présentation en Scott Pilgrim VS, rappelant les bons jeux de
baston existants, particulièrement ceux de l’époque Super Nintendo et
Megadrive. Mais c’est aussi dans la multitude de références, plus ou moins
explicites, que le film tient du génie. Presque chaque plan et chaque son sont
tirés d’un univers ou en rappelle volontairement un, même dans des scènes de la
vie courante. Ainsi, s’il n’est pas étonnant de voir des barres de vie
au-dessus des personnages en plein combat, il n’en n’est que plus drôle lorsque
soudain une barre de « Pee » (pipi) pleine fait apparition au-dessus
du personnage et se vide tandis qu’il urine, alors que rien ne nous avait préparés
à cela. Et les références pleuvent à n’en plus finir, sans jamais devenir indigestes.
Musique de The Legend of Zelda, de Final Fantasy, bruitages de Sonic, combat à
la Soul Calibur, 1-Up, porte à La Super Mario 64, level up, j’en passe et des
meilleurs. Le film est un concentré de bonheur ultime, que chaque joueur,
principalement entre 20 et 35 ans, se doit de voir et d’apprécier à sa juste
valeur. Et puis pendant que l’on y est, je ne sais pas si c’est dès l’origine
voulu, mais même dans le choix des acteurs, on peut y voir certaines références
« geeks ». Michael Cera et Mae Whitman, tout droit venu de la série
mythique mais finalement très restreinte Arrested Development, que peu
connaissent, à tort. Ou encore Brandon Routh, qui incarna Superman dans Superman Returns, ou bien Chris Evans,
qui interprétait La Torche Humaine dans Les
Quatre Fantastiques, avant de devenir Captain America. Là, sur les acteurs,
ce ne sont que des détails évidemment je suppose, mais quand même, certaines
références sont bonnes à prendre. Et bien sûr, étant à l’origine une bande dessinée,
le film y fait référence, comme cette phrase du personnage de Comeau, celui qui
sais tout, lorsqu’il dit « The comic book is better than the movie ».
De toute façon, le mieux c’est de voir le film, de le regarder, et d’en
découvrir toutes les subtilités, inexplicables autrement. Que dire donc, au
final ce film est…
Fight!
(1h53 plus tard)… une véritable tuerie, un chef-d’œuvre ultime,
un hommage impressionnant à toutes formes d’art et de cultures populaires, une œuvre
qu’il faut absolument avoir vu, voir, et revoir. D’ailleurs, je n’ai pas pu m’empêcher
de le remater en plein pendant l’écriture de cet article. Finalement, le comble
de ce film, c’est qu’étant bourré de références, il est lui-même devenu une
référence du genre. Sans oublier qu’une adaptation en jeu vidéo a aussi été
faite, façon beat’em all 16-bits évidemment, reprenant le style visuel du comic book, et il faudrait vraiment que je me
télécharge la démo sur le PSN, surtout que le jeu est bien foutu paraît-il. C’est
assez fou quand même, une bande dessinée qui parle de jeu vidéo, adaptée en
film, qui devient alors un jeu vidéo reprenant le style graphique de la bande
dessinée. Bryan Lee O’Malley ne pouvait sans doute pas rêver mieux. Quoiqu’il
en soit, Scott Pilgrim Vs The World
est tout simplement à ce jour l’œuvre la plus référencée, la plus pointue et à
la fois la plus accessible sur la culture populaire, principalement le jeu
vidéo. Culte avant même sa sortie, le film dépasse tout ce qui a été fait à ce
jour et place la barre très haut. Edgar Wright maîtrise complètement son sujet
et son film et le réalise de main de maître, en en faisant dorénavant la nouvelle
référence absolue du genre. Indispensable.
La première et meilleure bande annonce du film, pour ne pas trop vous en dévoiler
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