Littérature et jeux vidéo
peuvent faire bon ménage. On en a eu la preuve en 2010, avec la
sortie de Metro 2033, adapté du roman éponyme de Dmitri
Gloukhovski. Ce FPS, non exempt de défaut, arrivait à retranscrire
une ambiance poisseuse et oppressante dans les tunnel du métro de
Moscou, ainsi qu'à la surface, inhabitable suite à un apocalypse
nucléaire. Entre science-fiction et fantastique, on suivait le
parcours d'Artyom, un jeune homme qui n'avait rien d'un héros, mais
qui allait se révéler plus intéressant qu'on aurait pu le croire.
Metro : Last Light est la suite du jeu, mais n'est pas tiré de
l’œuvre Metro 2034. On continue d'incarner Artyom, dans une quête
aussi troublante que prenante. Entre survie, visions cauchemardesques,
et déchéance d'une humanité qui tente de survire autant que
possible, la lumière semble bien être la dernière.
Metro 2033 avait réussi à
imposer une ambiance et un univers dérangeant et glauque, fidèle au
roman, mais avec une identité visuelle propre. Des couloirs sombres
et inquiétant à la surface enneigée et glaciale, il y avait de
quoi se sentir parfois mal à l'aise. Metro : Last Light reprend
cette atmosphère et la retranscrit toujours aussi parfaitement, en
apportant des nouveautés plus que bienvenues. Les couloirs humides
et sombres se succèdent, et laissent place à une belle bande de
créatures aussi effrayantes que potentiellement humaines. Certes,
les mutants ou autres bestioles sont terrifiantes, de par leur force,
mais aussi par leur taille parfois, mais certains des ennemis les
plus terribles restent les humains. Avides de pouvoirs, totalement dérangés suite au nombreux dérèglements, ou bien cherchant à
imposer leurs idéologies (néo nazisme ou communisme primaire), les
hommes demeurent toujours la pire menace pour eux-même, et ce n'est
pas ce Metro qui va nous faire penser autrement. C'est donc dans
cette ambiance totalement anxiogène que l'on évolue, entre stations
de métro partiellement habitées, tunnels aussi sombres
qu'angoissants, et surface ravagée à la population mutante peu
amicale. Visuellement, c'est vraiment bien foutu, les décors
suintent, sont dégueulasses comme on pourrait se l'imaginer dans la
vraie vie, et on sentirait presque l'odeur nauséabonde qui devrait se
dégager des lieux visités. Et pourtant, alors que tout semblait
bien parti et que cet univers crédible ne demandait qu'à être
reconnu comme admirable, il fallait qu'il y ait ces petits trucs pour
venir gâcher un peu l'ambiance. Des couloirs sombres, une surface
verdâtre et grisâtre, ok, pourquoi pas, c'est cohérent.
Malheureusement, quand tout est finalement très terne, ce qui
survient au fil du temps, ce n'est plus l'admiration des décors, ni
même l'ennui, mais pire, ce sentiment d'être constamment perdu au
même endroit. Tout se ressemble tellement, que pour peu que le lieu
soit un tant soit peu ouvert, on ne sait jamais réellement où il
faut aller. Un comble pour un jeu couloir ! A cela s'ajoutent
divers bugs qui entachent parfois salement la maniabilité lorsqu'ils
ne sont pas risibles, mais heureusement rares, et finalement, cet
univers visuel si cher aux créateurs et aux joueurs deviendra plus
un simple terrain de jeu presque basique et non la petite claque à
laquelle on s'attendait. Heureusement, le scénario sauve un peu la
mise, offrant des histoires sordides de complots et autres noirceurs
de l'âme humaine, ainsi que des visions cauchemardesques aussi
dérangeantes que passionnantes. C'est déjà ça de sauvé.
C'est joli Moscou dites donc...
Côté gameplay, Metro :
Last Light ne propose rien de réellement inédit, mais les bases du
genre sont là, et elles assurent ce qu'il faut de cohérence au jeu.
On est face à un FPS classique, on avance, on tire, et l'on effectue
toutes sortes d'actions que le genre a répandu depuis quelques
années. Le héros, Artyom, peut porter trois armes à la fois, et au
fur et à mesure du jeu, il peut les améliorer afin de posséder celles qui lui conviennent le mieux. Chaque joueur est donc
finalement assez libre d'utiliser ce qui lui plaît. Pour le reste,
alors que le titre aurait pu le proposer, on ne se contente pas
d'exploration, mais de phases de jeu en couloirs, lors desquelles on
avance pour arriver à un endroit précis, ou déclencher un certains
type d'événement. A la manière des FPS blockbusters modernes, du
genre Call of Duty, Metro : Last Light mise beaucoup sur le
spectaculaire, parfois au détriment de l'angoisse, et les effets
pyrotechniques ou cinématographiques sont bien souvent présents,
comme les très nombreuses actions scriptées bien entendu. Derrière
cette façade, il y a pourtant de bonnes idées, qui pourtant ne sont
pas neuves, puisque tout droit venues de Metro 2033. La lumière tout
d'abord, puisqu'elle est dans le titre, est à la fois votre
meilleure alliée comme votre pire ennemie. Lorsqu'ils s'agit
d'éliminer certaines créatures des ténèbres uniquement sensibles
à la lumière, on est bien content d'avoir sa torche pour détruire ces saletés. D'ailleurs, la batterie s'use au fur et à mesure, et
s'il n'est pas nécessaire de trouver des piles ou autres, il faut
penser à régulièrement alimenter manuellement la dynamo, sous
peine de se retrouver bêtement en panne, et dans certaines
circonstances, c'est assez embêtant. Et puis, la lumière, votre
pire ennemie, puisqu'elle peut vous faire tuer. Lorsqu'il s'agit de
s'infiltrer, mieux vaut ne pas se faire repérer. Alors on éteint sa
torche, et on peut aussi éteindre les lampes du jeu, via une
commande, ou comme un porc, avec une arme. Un voyant lumineux sur la
montre indique si l'on est repérable ou non. Si l'on peut
privilégier l'approche de gros bourrin, l'infiltration est parfois
préférable, tant auprès des humains que de certains mutants. Ce
qu'il faut aussi savoir sur le jeu, c'est qu'il cherche à mettre en
avant le réalisme et les sensations crédibles. Ainsi, lorsque notre
personnage porte son masque à gaz, il a bien entendu un temps limité
devant lui, mais surtout, selon les coups qu'il prend, ce masque peut
se briser, devenant inutile. De même, la pluie, le sang ou la boue
viennent se coller au masque, dérangeant la vision générale. Il
faut appuyer sur un bouton pour essuyer son masque, temps court
certes, mais durant lequel on est sans défense. Metro : Last
Light fait donc tout pour être crédible et unique, malgré
l'héritage des FPS blockbusters récents.
Les humains peuvent être vos pires ennemis
Malheureusement, malgré
toutes ses qualités potentielles et ses idées aussi réjouissantes
qu'intéressantes, Metro : Last Light souffre d'énormément de
problèmes, principalement dans sa maniabilité. Le côté couloir
scripté est parfois trop prononcé, au point de briser parfois le
rythme, même si ce n'est pas encore un trop gros problème. Là où
sa devient véritablement embêtant, c'est dans la progression. Il
n'est pas rare, pour ne pas dire très fréquent, qu'on ne sache pas
ce qu'il faut faire. Et pourtant, on possède une boussole pour nous
indiquer la route. Le gros problème vient du manque d'information ; on ne sait pas toujours ce qu'il faut faire si ce n'est bêtement
avancer ; mais aussi des décors qui se ressemblent trop. On se perd
parce qu'on ne sait pas où il faut aller, comment y aller, ou parce
que le chemin ne ressemble à rien de potentiellement utilisable. Et
lorsqu'on est dehors, avec un temps limité du fait du masque à gaz,
tourner en rond n'a rien d'amusant. On peut aussi noter que les
actions contextuelles scriptées faisant avancer le jeu peuvent se
déclencher en appuyant sur une touche, mais aussi sans que l'on ne
fasse rien, juste en étant là au bon moment. Le problème, c'est
que rien ne nous indique si l'on est au bon endroit ou non, si ce
n'est le déclenchement de l'action en lui-même. Or, parfois, il
suffit d'être à quelques centimètres d'écart pour que rien ne se
déclenche. On peut donc tourner en rond comme un abruti en pensant
ne pas être au bon endroit, alors que si, mais rien ne nous le
laisse penser. Sans oublier les actions scriptées qui parfois n'ont
pas lieu, forçant le joueur à revenir au précédent point de
sauvegarde sous peine d'attendre inutilement et éternellement. On
note aussi que si tomber dans l'eau est dangereux parce que l'on peut
s'y faire bouffer, c'est surtout la bêtise du héros et les
incohérences visuelles qui choquent. Essayer de sauter au dessus
d'une étendue d'eau, tomber juste devant la plate-forme, remonter à
la surface juste devant, et se relever sur la surface de terre non
pas que l'on a essayé d'atteindre, mais que l'on a quitté, oui
c'est absurde. Regarder tout droit pour sortir en arrière, c'est
aberrant même ! On pourrait aussi pester contre les fusillades,
très vite brouillonnes et illisibles, qui rendent l'action
incompréhensible, et qui n'aident pas à la réussite, bien au
contraire. C'est quand même un peu un comble dans un jeu
privilégiant l'action, de partir en sucette dès qu'il y en a
justement un peu trop d'action. A savoir que vous coéquipiers ne
vous faciliteront pas la tâche non plus, se positionnant
régulièrement devant vous, voire même à travers vous ! Oui,
il y a des bugs parfois gênants, mais on va éviter de tous les
citer. Il y en a peu au final, mais ils sont quasiment tous
dérangeants dans le gameplay, forçant souvent à reprendre à sa
précédente sauvegarde. Oui, un univers, c'est bien, un gameplay qui
suit, c'est encore mieux.
Metro : Last Light
avait tout pour être un très bon jeu, mais le destin en a voulu
autrement. La promesse d'un univers dérangeant accompagné d'une
ambiance oppressante et anxiogène est bien tenue, et dans son
scénario, son aspect visuel, ou bien son rendu sonore, rien n'est
véritablement à reprocher. C'est dès que l'on rentre dans le
gameplay que l'on se rend compte de l'ampleur des dégâts. Apporter
peu de réelles nouveautés à un genre, cela n'est pas trop grave,
on ne demande pas à un jeu de réinventer le genre à chaque fois,
mais s’emmitoufler dans des défauts totalement aberrants et qu'on
n'imaginait plus digne de ce type de productions, c'est déjà moins
pardonnable. Alors oui, il reste à Metro : Last Light son
univers qui a de quoi réellement séduire, mais malheureusement,
lorsque le gameplay, pas forcément dégueulasse dans l'absolu, n'est
pas à la hauteur, on obtient un résultat mitigé. A noter, dans les
points négatifs, que le jeu n'est pas du tout optimisé pour PC, on
préférera donc y jouer sur console, un comble pour un FPS. Sans oublier le mode de difficulté extrême, disponible uniquement en DLC ou dans l'édition spéciale du jeu, un scandale. On reste
donc un peu sur sa faim, et peut-être que l'on en attendait trop de
ce titre très prometteur, qui tient parole dans son ambiance, mais
qui a de quoi décevoir pour le reste. A vous de voir si vous avez
envie de tenter l'expérience, qui vaut pourtant le coup. Reste à
savoir si une suite, basé sur le roman Metro 2034 verra le jour dans
quelques années, où s'il s'agit ici du dernier Metro.
13/20
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